![]() |
Les fichiers sont en .pdf et s'ouvrent avec
Adobe Acrobat Reader. Si vous ne le possédez pas vous pouvez le télécharger
ici:
Pour un meilleur affichage des fichiers .pdf avec le navigateur Firefox: désactivez le lecteur intégré. Mozilla Support
![]() |
||
Ed.Praelego- 2ème volume |
||
ROMAN
N°02
|
||
ROMAN N°3
|
||
ROMAN N°04
![]() |
||
ROMAN N°05 ![]() |
![]() |
|
ROMAN N°06
|
Le Pythagore éditions www.lepythagore.com |
|
ROMAN N°07 ![]() |
Le Pythagore éditions |
|
ROMAN N° 08 ![]() |
Le Pythagore éditions |
|
ROMAN N° 09 ![]() |
Le Pythagore éditions |
|
ROMAN N° 10 ![]() |
À paraître |
|
ROMAN N° 11 ![]() |
"Parution en janvier 2021" | |
ROMAN N° 12 |
||
ROMAN N° 13 ![]() |
Parution prochaine | |
ROMAN N° 14
![]() |
||
ROMAN N° 15:
![]() |
En attente de publication
|
|
ROMAN N° 16 ![]() |
||
ROMAN N° 17 ![]() |
En attente de publication | |
ROMAN n° 18:![]() |
En attente de publication | |
ROMAN n° 19:![]() |
En attente de publication | |
ROMAN n° 20:![]() |
En attente de publication |
– LE CHALLENGE: PUBLICATION CHAQUE MOIS DE NOUVEAUX CHAPITRES ECRITS AU JOUR LE JOUR –
UN PETIT SOULIER ROUGE DANS LA NEIGE BLANCHE
Christian Moriat
CHAPITRE 1
L'AMI BUBU
Son nom c'est Buchsbaum. Samuel Buchsbaum. Et on l'appelle Bubu. C'est plus facile à dire. Et à écrire. Vous le croyez allemand...? Raté. Il est polonais. Pour être tout à fait précis, il l'a été. Mais ne l'est plus, vu qu'il habite à Vendeuvre, dans la Grand'Rue. Une toute petite échoppe coincée entre une ruelle et une mercerie. À l'image de notre homme. Lequel n'est pas bien épais. Extérieurement, notre cordonnier
est menu. Et tout ratatiné. Un mètre vingt. Un mètre
cinquante. Guère plus. Il faut avouer qu'avec son dos voûté
et son buste qui penche du côté qu'il va tomber, on
a du mal à se faire une idée de sa taille. En outre,
on ne lui voit point le cou. Le col roulé de son pull nous
le cache. Bubu, c'est un peu comme les mètres pliants. Sûr
que tout déplié, notre artisan doit faire plus grand. Il est coiffé de son inséparable béret aux couleurs délavées. Même qu'il doit dormir avec. Porte un ample pantalon de velours marron à grosses côtes, rapiécé aux genoux. Et un vaste tablier en cuir avec ceintures et bretelles. Quant à ses souliers, ce sont des sandalettes, aux brides usées par le passage répété de la boucle. Ce qui confirme le vieil adage selon lequel les cordonniers sont les plus mal chaussés. Par contre, il a des yeux –
mmm ! – limpides et purs. Comme celui d'un enfant. Puis un
sourire... délicat et bienveillant. À cause de ses
lèvres fines. C'est bien simple : dans cette sombre boutique,
dans laquelle il exerce son art, il irradie. Parce que Bubu est
habité. Ce qui fait de lui un homme de bien. Un homme qui
mérite d'être connu. Et ceux qui ne le connaissent
pas se privent involontairement d'une belle rencontre. Car il a
la lumière communicative. Son atelier, est au rez-de-chaussée – forcément ! –. À hauteur de client. Comme je ne suis jamais monté au premier, je ne peux pas vous le décrire. C'est là où il cuisine. C'est là où il a sa chambre. Enfin, je suppose. Et pour lui, c'est amplement suffisant. Mais s'il est à l'image de son atelier, il doit être dans un bel d'état. Justement, de son atelier, parlons-en.
C'est un beau capharnaüm. Une fois cette barrière
olfactive franchie, il reste vos yeux pour voir. Et le spectacle
est surprenant. Par contre, lorsque ceux-ci sont attachés par leurs lacets, ou par leur bride – quand ils en ont pourvus –, la recherche en est facilitée. Malgré tout, en cas d'erreur, les propriétaires seraient à même de corriger la méprise. Enfin, il y en a beaucoup qui lui restent sur les bras. D'où l'ampleur du tas. Il y a ceux qui oublient. Il y a ceux qui déménagent. Puis il y a ceux qui ont appartenu à des soldats de l'armée d'occupation. Lesquels pressés de repasser de l'autre côté du Rhin, lors de la Libération, ne sont jamais venus les lui réclamer. Pas le temps. Certains ayant dû repartir en chaussettes. De toute façon, s'ils étaient revenus les chercher, cela n'aurait pas avancé à grand-chose. Vu que notre cordonnier, ne portant pas les « boches » dans son cœur, ne les avait jamais réparés. Finalement, pour se repérer, c'est assez simple. Ceux qui sont au sommet du tas, sont les derniers à avoir été apportés. Et les derniers à avoir été ressemelés. Et plus vous vous rapprochez de la base, plus vous remontez dans le temps. Pour reprendre la description de
sa boutique, le mur de droite est occupé par une série
de réclames, dont celle du cirage Ours noir à la cire,
de la crème Ça-va-seul, des chaussures Bata –
« Pas un pas sans Bata » – et des bottes Le chameau
– « Pour la pêche et la chasse... Doublées Quant au mur de gauche, il est en partie masqué par un meuble à étagères, sur lesquelles reposent tous les outils indispensables à son métier, dont deux ou trois bisaiguës, un lot de tranchets, de gouges et de pinces à monter, de pinces emporte-pièce revolver, de pinces à poser les œillets et les boutons, puis divers marteaux de cordonnier, Louis XV, de galochier, à clouer ou à battre, des alênes, des embauchoirs, des emporte-pièces, des formes, des compas, des gabarits. Sans oublier les boîtes de petits clous, de semences, de fers, d’œillets métalliques, de chevilles, de lacets et les pots de vernis, de cirages et de graisses. Sans compter les colles spéciales – dont la « poix de Suède noire » –, les bobines de fils de chanvre et de lin, tout à l'heure évoqués. Puis les feuilles de cuir et de caoutchouc, les talonnettes et les patins. Il n'a qu'à se tourner, du tabouret sur lequel il se tient, pour choisir ce dont il a besoin. Alors que, devant lui, trône un établi particulièrement encombré de chutes de cuir et de toutes petites pointes, à côté d'une presse Daude, d'un tour à bois, d'une meuleuse et d'une enclume en fonte à trois branches, pour maintenir les chaussures, sur laquelle il s'affaire du matin au soir, à la lueur d'une lampe à abat-jour vert empoussiéré. Malgré la présence d'une fenêtre encrassée et rembardée ¹ de toiles d'araignée, qui laisse à peine entrer la lumière du jour. Ce qui, comme je l'ai souligné, rend la pièce obscure. Voilà pour l'homme. Voici pour le décor.
_______________________________________________________________________________________________
CHAPITRE 2
LE SOULIER DANS LA NEIGE
_______________________________________________________________________________ 1. Rivière qui prend sa source sous le château et qui traverse le village.
J'étais jeune à cette époque-là. J'avais dix ans. Et peu expérimenté. J'ignorais que pour glisser, il fallait que la neige soit tassée. Ce dont je n'avais pas tenu compte. Aussi m'avait-il fallu capituler. Je venais de réaliser que j'aurais mieux fait de descendre les deux côtes, que je venais si difficilement d'escalader. Ce n'étaient pas les quelques voitures qui m'en auraient empêché. Car, les conditions météorologiques ayant incité les automobilistes – peu nombreux à l’époque – à ne pas sortir leurs véhicules du garage, j'aurais pratiquement eu la route, pour moi tout seul – une route verglacée à souhait. Aussitôt, je m'étais mis en devoir de remonter mon engin, en le tirant par la corde, à la manière d'un chien tenu en laisse... J'avais froid. Très froid. J'étais rouge. Très rouge. Mes yeux pleuraient. Mon nez coulait. Et j'avais l'onglée, car j'avais oublié mes gants. C'est alors que je sentis que l'un des patins, venait de glisser sur quelque chose de dur... Ce qui avait provoqué un sursaut à ma luge. J'avais pensé à une taupinière ou à une racine. Seulement, « la chose » que ma machine avait en partie extraite de la poudreuse, était rouge. Plus rouge que mes joues..... Bizarre, bizarre. Abandonnant pour un temps «
mon véhicule », je m'approchai. L’extirpai. La
« dépoussiérai ». Tiens ? Un soulier de
femme ! Un joli petit soulier droit, tout neuf, à talons
plats et à bout rond. Tout mignonnet. Avec, sur le dessus,
un trochet de franges vertes en cuir, en guise de décoration.
Lors qu'à l'intérieur, figurait la marque des «
Chaussures André ». Au fait, j'avais la droite. Mais
où donc était passée la gauche ? J'ai eu beau
fouiller, creuser, trifouiller, malgré le froid, je ne trouvai
rien. Je traînai ma luge jusqu’à la départementale. Et vogue la galère. Le retour à Vendeuvre, fut une formalité. Vu qu'il suffisait de se laisser glisser, le long des deux côtes, que j'avais eu tant de mal à monter. Vite ! Vite ! Sitôt à
la maison, je dressai mon engin contre le mur – rue Saint
Pierre, il n'y a pas de voleurs –, frappai mes pieds contre
les marches, pour débarrasser la neige de mes souliers. Et
entrai en coup de vent dans la demeure familiale. Tout en interpellant
ma mère, qui était dans la cuisine : ________________________________________________________________________________ 1. Choses sans valeur (Patois local) – Aux Varennes. Dans la neige. – Il n'empêche, reprit-elle.
Ton histoire est bizarre autant qu'étrange. Comment peut-on
égarer son soulier dans la neige ? Surtout un seul ? Et le
laisser... ? La femme qui la portait serait donc repartie à
cloche-pied ? Ça ne se peut pas. À moins qu'elle l'ait
cherché et qu'elle ne l'ait point retrouvé dans la
neige ? – Tu n'as pas vu de traces
de pas ? Autour ? Des objets ? Je ne sais quoi? C'est alors qu'elle me conseilla d'aller le porter chez le cordonnier Bubu. Car cette histoire n'était pas claire.
CHAPITRE 3 CHEZ LE CORDONNIER
– Dzien dobry ¹, petit.
Qu'y a-t-il pour ton service ? qu'il avait demandé, dans
un fort accent polonais, qui lui avait appris à rouler les
R. Je le revois. Assis sur son tabouret.
Une pincée de clous entre les lèvres. Courbé
sur le ressemelage d'une paire de godillots – un véritable
tour de force, vu qu'en parlant, il n'en avalait aucun. Ce qui m'avait
subjugué. D'autant plus qu'ils étaient petits petits.
Mais, à l'époque, je connaissais mal le personnage.
1. Bonjour (Polonais) était désert ! Sans
doute la faute au mauvais temps. Mais, c'était aussi bien. Par la suite, lorsque je deviendrai l'une de ses pratiques, je m'apercevrai, en le voyant bavarder avec Pierre, Paul, Jacques, que tenir une conversation avec lui, est le fruit de l'habitude. Tellement il a l'art d'entretenir le suspens. – Tu ne serais pas le fils
Beauval, des fois ? qu'il m'avait fait. Il m'expliqua qu'il avait été trouvé derrière l'abattoir. Au bord de la Barse. Juste avant les chutes de neige. C'est Julien Beaucarne, le préposé aux vannes, qui l'avait découvert, derrière un buisson. Avec un mouchoir en dentelle, taché de sang. En effet, lorsque gonfle la rivière, on libère l'eau en remontant le vannage, pour réguler le flux, afin d'éviter d'éventuelles inondations dans la commune. Ce qui s'était déjà produit, il n'y avait pas si longtemps, suite à une négligence – les vannes n'ayant pas été relevées –. Aussi, ayant été pris pour être appris, la municipalité avait-elle délégué un employé communal pour veiller sur le débit de l'eau. Il est vrai qu'avant les chutes de neige, il avait beaucoup plu. Et la rivière avait menacé de sortir de son lit. C'était la raison pour laquelle il avait traîné à cet endroit. Bref ! D'après les dires du cordonnier, se doutant qu'il y avait anguille sous roche, l'homme s'était emparé de la chaussure, mais pas du mouchoir, qu'il n'osât point toucher. Par dégoût. Vu qu'il était souillé. Puis s'en était allé la porter à la brigade. Le chef Jean-Marie Coignet, après
avoir examiné l'objet sous toutes les coutures, avait interrogé
notre employé. Comme cela n'avait rien donné, il se
décida à le porter chez notre cordonnier... Finalement
pour rien. Puisque le soulier étant neuf, Bubu n'avait jamais
eu l'opportunité de le réparer. D'autant plus qu'il
n'en était pas le créateur. Ce qu'il déplora,
car, une fois celui-ci débarrassé de la boue qui l'enveloppait,
il s'était aperçu qu'il était très joli.
De toute façon, si cela avait été lui qui l'avait
découvert, il n'aurait pas manqué de contacter immédiatement
la gendarmerie. Cela allait de soi. Puis, accompagné d’Émile
Charlot – l'un de ses subordonnés –, tous deux
s'étaient rendus sur les lieux, afin d'enquêter. Par
chance la poudreuse ayant en partie fondu, avait libéré
une large tache d'herbe verte. N'ayant rien découvert de plus, Coignet envoya le seconde classe Hervé Toulon, avec un sac de plâtre. Pour réaliser des moulages. Puis fit analyser le mouchoir en question. Plus tard, il apprendra que le sang était de rhésus AB positif. C'était bien maigre pour faire progresser l’enquête. C'était, comme je l'ai déjà
signalé, que soulier et moulages sous le bras, notre brigadier
avait pris l'initiative de consulter l'artisan. Lequel avait vu
tellement de chaussures passer entre ses mains, qu'il aurait pu
avoir une opinion, sur le sujet.
CHAPITRE 4 À LA GENDARMERIE
Il est vrai qu'en hiver, ces lieux
sont peu fréquentés. Surtout le second. – Faisons le point, décida-t-il,
brusquement. En ouvrant le tiroir de son bureau. Pour en extraire
un vieux carnet où il consignait les indices d'une affaire
que les journaux appelleront bientôt « De la neige sur
les pas », parodiant ainsi le film d'André Bertomieu,
« Du sang sur la neige » ou mieux encore « La
neige était rouge ». Bien qu'aucune trace de sang n'ait
été relevée. Mise à part sur un mouchoir
en dentelle. Mais ce genre de titres était plus vendeur. Puis, relevant la tête, il
s'adressa à Bubu : Puis, il se replongea dans ses
réflexions : Sans répondre, le brigadier
referma son carnet. Et le promena machinalement au bord de ses lèvres.
Dans un va-et-vient traduisant son impuissance. Puis, après
avoir soupiré, il ajouta: J'expliquai que ma mère
allait s'inquiéter, car cela faisait longtemps que j'étais
parti. Ce à quoi le cordonnier déclara: CHAPITRE 5
RETOUR SUR LES LIEUX
Après que son Estafette
eût difficilement escaladé la première côte,
à mi-chemin de la seconde – la route de Villy-en-Trodes
étant beaucoup plus raide –, les roues patinèrent.
Firent les folles. Puis le moteur s'emballa. Cala. Redémarra.
Et le véhicule se mit en travers de la route. Pour s'échouer,
par chance, à l'extrême bord d'un fossé –
une touffe d'herbe, qui n'avait pas totalement été
recouverte de neige, doublée d'un reste de terre, ayant freiné
l'inévitable culbute – Ouf ! Ce dernier se mit alors à
jurer contre les mauvaises conditions atmosphériques. Et
sur « cette foutue enquête ». Qu'il ferait bien
d'abandonner. Vu qu'on ne lui avait rien demandé. Et qu'il
ferait mieux de terminer sa carrière « en roues libres
». Puis, il donna de violents coups de poings au volant, comme
si celui-ci était fautif. Puis appuya sur le champignon.
Comme un forcené. Ce qui eut pour effet de faire une nouvelle
fois de faire surchauffer le moteur. Et tourner inutilement les
roues dans le vide. Enfin, après diverses manœuvres,
dont une marche arrière salutaire, il réussit tant
bien que mal à débloquer la situation. Et c'est de conserve que nous atteignîmes la fameuse sente. Pour nous diriger, par la suite, vers le lieu de La découverte. En suivant les traces de patins oubliées par ma luge – deux sillons pour l'aller, deux autres pour le retour –. Ainsi que mes pas laissés dans la poudreuse. Le soleil dardait ses rayons. Le ciel était d'un bleu opalescent. L'air était vif. Lors que fumaient nos haleines. Et, fors le crissement de nos semelles et le han-han répété d'un brigadier à bout de souffle, et qui avait peine à me suivre – tant il était enveloppé –, régnait le plus profond silence. En contrebas, dans la vallée,
on devinait le village de Vendeuvre, noyé de blanc. Avec
des cheminées qui laissaient échapper des filets de
fumée. Tandis que se dressait le clocher de l'église,
à qui il ne manquait plus que des boules et des guirlandes
pour ressembler à un arbre de Noël. Nous parcourûmes encore deux
cents mètres. Là où s'était arrêtée
ma luge, avant de brusquement obliquer sur la droite. Jusqu'à
un petit monticule de neige. Lequel m'avait empêché
d'aller plus loin, faute de ne pas avoir préalablement damée
la pente. Avec, un sol tout autour piétiné. À
tel point que, par place, on apercevait encore les sombres traces
d'herbe et de terre, que j'y avais laissées. Preuve que j'avais
bien « balayé » le terrain. Une fois encore, les traces que
j'avais abandonnées le guidèrent... Un « trou
» dans la neige. C'était bien ici. Le brigadier se releva. Regarda
au loin. Du côté de l'abattoir. Comme s'il allait découvrir
un quelconque indice .... En pure perte. La neige ayant émerisé
les champs. Lorsque, soudain! Plus tard, dans sa fourgonnette,
il dit : Seule, ma mère prit l'affaire
au tragique. Malgré mon père qui déclara qu'il
ne fallait pas en faire une montagne.
|
Biographie |
Théâtre |
Sketches |
Contes |
Poésie |
Réflexions |
Romans |
Accueil |